Perception du temps & histoire personnelle, la même illusion
Quel lien peut-il exister entre l’histoire personnelle, au sens de la cohérence Toltèque de Castaneda et la notion du temps dans la physique classique ? La création de l’illusion du temps est une aventure fabuleuse pour voir le génie de l’imaginaire Humain. Que ce soit sur le monde physique avec la notion de temps ou en “psychologie” avec la notion de “JE SUIS” , c’est nous, l’observateur qui en cherchant à définir et à contrôler avons réussi à créer la façon dont l’objet de notre étude existe.
A force d’observer le temps (et notre nombril) nous avons réussi à le définir, à le normer et à faire rentrer dans les cases de notre réalité un objet informe. Nous avons crée le temps, nous avons créée la définition de ce que devait être le temps et nous créons de la même manière notre histoire personnelle.
Alors qu’est-ce que le temps, et comment notre perception du temps influence nos vies ? Vaste question, vaste programme… Je vous propose un bref aperçu de ces questions avec cet article, un petit voyage dans le temps du temps pour découvrir, comme le disait “le Lama blanc” de Bess & Jodorowsky : “Illusion tout n’est qu’illusion”.
Et l’humain créa la réalité du temps
Avant même de parler physique je trouve intéressant de rappeler que l’étymologie de TEMPS vient du latin tempus et du grec ancien temnein impliquant l’idée de couper, séparer, morceler. La base de notre conception du temps porte en elle l’idée de fractionner l’immensité pour mieux la définir. Je fais un rapide rapprochement avec notre histoire personnelle qui a pour but de limiter la totalité de nos vies à des bouts, des éléments phares. Mais revenons à la physique.
La construction de l’idée du TEMPS commença par la création des valeurs et des échelles de temps. Comme souvent, l’humain c’est assis et en comparant les phénomènes physiques qui l’entourait il en a déduit et construit des normes, des cadres. Le temps commençait à se définir.
Je vous passe les détails mais la définition du temps c’est faite simplement en observant le monde autour de soi à un moment X et en le comparant à un autre moment Y que l’observateur avait préservé dans sa mémoire. Un peu comme pour notre histoire personnelle donc.
A partir de ces comparaisons, aussi fiable que la mémoire peut l’être au passage, l’humain a construit une convention de ce qu’était le temps. Ces échelles de valeurs nous les employons tous sans nous rendre compte de ce qu’elles cachent. Aujourd’hui bien rares sont les individus conscients que le temps est simplement une construction mentale, une définition auto validée et absolument pas une réalité physique (comme l’argent d’ailleurs).
L’humanité nomma année la durée que met la Terre pour faire une révolution autour du soleil. Une journée c’est la durée entre deux levers de soleil, il y a 365 journées dans une année. Ensuite on a simplement continué de découper le temps pour mieux le hiérarchiser et le définir. C’est la création des heures, minutes, secondes, nano secondes …D’autres cultures ont définis le temps sur d’autres valeurs tout aussi arbitraires. Chaque civilisation croit en la vérité et la réalité de ses constructions du temps.
Toutes ces normes et échelles de valeurs créent la structure du temps. Leur but ? Pouvoir appréhender et mesurer plus facilement les phénomènes physiques que nous percevons ! L’Humanité, pour s’expliquer le monde qu’elle percevait a créée de toute pièce la structure du temps. Hélas elle a oublié sa propre création et en a fait une réalité, un dieu.
Einstein, le temps et l’instant présent
Einstein, en développant la théorie de la relativité restreinte, a démontré que le présent n’existe pas. Il n’existe pas un présent absolu et universel qui soit le même pour tous et partout.
Notre perception du présent est relative, localisée : mon présent dépend de mon environnement immédiat, et n’existe que dans mon environnement immédiat. Si le présent n’existe pas de façon absolue, il en est de même pour le passé et le futur ! Ce que j’appelle “passé” et “futur” n’existe que pour moi, dans mon environnement, c’est-à-dire dans la petite région de l’espace que je peux percevoir.
Le passé-présent-futur de Jean-Claude lui est propre, personnel, intime. Quelqu’un d’autre aura un autre “passé”, un autre “présent” et un autre “futur”, qui ne sont pas alignés avec ceux de Jean-Claude. Ainsi chacun crée sa propre échelle de temps, tout comme chacun crée ses propres échelles de valeurs.
La physique quantique moderne cherche entre autre à comprendre ce qu’est le temps, d’où il “vient”, et démontre qu’à l’échelle des particules élémentaires le temps n’existe pas (cf “L’ordre du temps” par Carlo Rovelli).
Ainsi la sensation du temps qui passe émerge en réalité des limites de la perception humaine, qui est incapable de percevoir la totalité de l’infiniment complexe réalité des interactions de la matière à l’échelle des particules élémentaires.
Nos sens étant par nature limités on ne peut percevoir qu’une image “floue” et locale de la réalité qui nous entoure, et c’est de ce flou, associé à nos capacités cognitives de mémorisation, que naît la sensation du temps qui coule: le temps naît du flou de notre perception.
Je vous laisse deux minutes pour réfléchir vraiment à ce que ça implique avant de rapprocher la science de la méta-science et du travail que propose Carlos Castaneda.
De Einstein à Castaneda il n’y a qu’un pas !
Après cette introduction trop sommaire du temps vu par la physique, j’aimerais aborder brièvement le thème du petit tyran personnel. Cette notion est développées dans les livres du compère Castaneda mais sous l’angle du petit tyran extérieur à soi. Je trouve au passage intéressant de rapprocher le petit tyran intérieur de ce que Don Juan Matus nomme “implantation étrangère” et les gnostiques ARCHONTES.
Maintenant on va faire un double salto arrière de l’esprit en reliant la physique, la notion de temps et la notion d’implantation étrangère de la cohérence Toltèque de Castaneda.
En effet l’implantation étrangère, le planeur, ou le grincheux comme nous aimons l’appeler, est notre petit tyran intérieur. Notre perception très partiale du temps, elle, est un des pièges majeurs permettant aux tyrans intérieurs et extérieurs de nous dominer.
Je m’explique : c’est notre propre perception et définition du temps qui alimente notre suffisance et ses déclinaisons, apitoiement et auto-contemplation. En cultivant notre attachement à un passé et à une forme du futur, en gros à notre histoire personnelle d’un côté (passé), et à nos espoirs, désirs et peurs de l’autre côté (futur), on nourrit le petit tyran qu’est la suffisance subit.
Le temps est une construction mentale issue des limites de nos sens. Elle est utile pour appréhender une partie du monde, mais nous nous y sommes sur attaché au point d’en faire la seule réalité envisageable. Avec notre histoire personnelle, la définition que nous nous donnons de nous même, on a fabriqué, comme avec la notion du temps en physique, des ancrages énergétiques et émotionnels par lesquels on ne se définit que via notre histoire personnelle et la forme particulière que nous avons choisis de voir dans les expériences que nous avons vécu / à vivre.
Notre temps passé ne peut exister qu’à travers les échelles de valeurs que nous avons nous même choisi, puis élevé au rang de seule vérité possible sur le temps que nous avons vécu.
Je vous laisse relire ce chapitre. Je suis désolé, c’est un peu épais, mais je suis ingénieur, et encore je suis sur d’oublier des précisions. En plus à tous les coups Renaud va rajouter des trucs donc, petite pause, pour que vous relisiez bien.
L’illusion du temps et l’histoire personnelle
Le 6 de la série des nuages dans le tarot d’Osho, Le Fardeau, est une belle illustration du poids que nous fait porter notre construction personnelle du temps (notre histoire personnelle) : on y voit un personnage, Jean-Claude, qui a littéralement un petit tyran avec une sorte de costume de bouffon assis sur ses épaules, avec-lui-même un gros coq a l’air arrogant posé sur la tête.
Jean-Claude a l’air complètement hagard, et avance sous les ordres du petit tyran qui lui donne, impose, une direction à suivre, qu’on peut imaginer comme étant un futur ou un passé. En tout cas une montagne que Jean-Claude s’efforce péniblement de gravir.
Le petit tyran n’éclaire pas le personnage sur son présent, le fameux ici et maintenant, il ne lui dit pas “regarde, tu souffres parce que moi, petit tyran, je t’écrase aussi surement que le coq arrogant qui me chie sur la tête”.
D’ailleurs Jean-Claude n’a même pas l’air de remarquer les fardeaux qu’il se trimballe et qui lui dictent où aller. Il avance, il geint, il soupire, il peine à vivre son pseudo instant présent qui n’est que la répétition d’un passé/futur.
Perception du temps vs perception de notre histoire
Alors que faire de cette perception du temps, intrinsèque à nos limites sensorielles ? La sensation du temps est en effet dépendante de notre perception. Notre mémoire ancre d’ailleurs cette sensation dans notre mental. Tout bon citoyen français lambda sait en effet que vendredi soir c’est le weekend youpla boum on peut aller faire la fête, le jour du seigneur c’est dimanche, le JT de TF1 c‘est à 20h, et se rappelle des repas de Noël de son enfance avec l’oncle bourré qui finit par sortir des blagues de cul entre le fromage et la bûche.
Par contre, notre attachement au temps passé et au futur, lui, n’est pas intrinsèque à notre perception. On choisit de se remémorer en permanence qui on est, c’est-à-dire de se répéter en permanence notre propre définition de “moi je”.
Cette définition du “moi” est basée sur ce que “on” nous a appris dans le passé: “on” nous a dit comment il fallait être ou ne pas être, ce qui était “bien” ou “pas bien”, et “on” nous a dit quel futur était souhaitable, quels espoirs il fallait cultiver, et c’est avec l’encre des émotions (douloureuses et/ou joyeuses) que tous les articles de notre définition ont été inscrits dans notre mental.
Il est maintenant bien établi par la communauté scientifique que notre mémoire a une fâcheuse tendance à déformer la réalité des expériences passées en fonction des émotions ressenties au moment de ces expériences. C’est en partie pour cette raison que les expériences traumatiques et les chocs sur la construction de la personnalité prennent autant d’importance dans notre histoire personnelle de notre temporalité.
Autrement dit, l’emprise émotionnelle de notre passé et de notre futur virtuel sur notre présent est un choix, quoi qu’en dise les voix de notre apitoiement et notre auto-contemplation.
Ces choix qui construisent notre “moi” ont été fait car ils étaient utiles, voire nécessaires, à un moment donné, mais il ne tient qu’à nous d’en faire des choix définitifs, ou au contraire de nous redonner la liberté de redevenir fluide, et de se “dé-définir” pour pouvoir se redéfinir à l’infini.
Le petit break de relecture pour relire tout ce chapitre. Je suis contrariant, je sais, mais si on veut tirer la substantifique moelle de quoi que ce soit il faut avancer doucement et relire beaucoup.
Ici e(s)t maintenant la clé pour choisir notre histoire personnelle ?
En réalité, comme la physique moderne arrive à le démontrer, le seul temps qui existe pour chacun est maintenant. C’est aussi une des clés du bouddhisme zen, selon lequel le sage doit comprendre que l’écoulement linéaire du temps n’est qu’une convention. L’éveil selon le bouddhisme zen consiste à prendre conscience que l’instant présent est la seule réalité. Il n’y a rien en dehors de ce “maintenant éternel”.
Dans la pensée zen comme dans la physique moderne du temps, le passé et le présent n’existent pas, ils ne sont que des illusions. Le temps est créé par les interactions et les interdépendances entre toutes choses, seul existe l’instant présent, en perpétuel mouvement.
“Il n’y a que ce maintenant. Il ne vient de nulle part, il ne va nulle part. Il n’est pas permanent ; il n’est pas impermanent. Quoique mourant, il est toujours immobile”
Une interprétation bergsonienne du bouddhisme zen –
Michel Larroque
Maitriser notre perception du temps et notre histoire personnelle
“Ici et maintenant, c’est la clé essentielle pour faire taire la voix assourdissante de notre suffisance.”
En pratiquant régulièrement ce mantra simple mais extrêmement puissant on ouvre une porte pour s’extirper de la domination de la suffisance. Ramener la totalité de son existence à l’instant présent, à son “ici et maintenant”. D’autres pratiques similaires ont le même effet, le même but : recentrer son énergie, récupérer les bouts de nous placer en amont ou en aval d’une piste temporelle qui n’est qu’une illusion.
Sur LA PASSERELLE nous vous proposons les balancements & les centrages, mais plus globalement tous les exercices de méditation répétés fréquemment fonctionnent, depuis le bénédicité chrétien avant les repas jusqu’à la prière face à La mecque en passant par la méditation “fpleine conscience”. Le but est de renouer, réhabituer notre corps et notre champ d’énergie à la sensation et au sentiment du “ici et maintenant”.
Plus le sentiment de l’instant présent grandit et devient prépondérant, plus on va pouvoir détecter nos moments de “fuite” dans le passé / futur, pour pouvoir revenir dans le présent, ou tout du moins pour pouvoir apporter de la distance et observer ces “fuites”.
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Tuer son histoire personnelle ?! Pourquoi faire ?!
Mais il serait illusoire d’affirmer qu’on peut complètement s’affranchir du passé et du futur, tel des moines zen retirés au fin fond d’un temple tibétain. D’ailleurs personnellement ça me fait pas rêver comme vie, j’aime trop le bon vin, le camembert fermier et le cul de la crémière. On va donc devoir trouver un moyen de faire avec notre “passé” et notre “futur”.
Il est important de planifier, anticiper, et de se rappeler de son vécu, non pas pour se projeter dans un passé ou un futur qui n’existe pas, qui n’a jamais existé et n’existera jamais, mais au contraire pour étendre le présent.
Les souvenirs des expériences vécues sont très utiles pour agir dans le présent, pour informer son “ici et maintenant”.
On peut notamment s’en servir pour voir les mécanismes de notre suffisance, comprendre ce qui définit les situations “qui ressemblent suffisamment à” (comme dirait Jacques Ravatin) et qui déclenchent nos comportements habituels d’apitoiement et d’auto-contemplation.
Vous savez nos très communs “ouin-ouin je suis qu’une pauvre merde seule au monde personne ne m’aimera jamais”, “c’est ma faute ma très grande faute oh mon dieu/papa/maman me pardonneras-tu un jour ?”, “oh comme je suis grand beau et fort, vous autres pauvres mécréants ne méritez même pas que je vous pète dessus” etc…
Bref, maitriser son histoire personnelle, la connaitre, la reconnaitre c’est utile si on utilise ces souvenirs plutôt que d’être utilisés par eux. En revanche, si on essaie de transformer son présent en passé (nostalgie, regrets) on ne crée que de la frustration, de l’apitoiement, on ne fait que nourrir son auto-contemplation.
Planifier, (re) structurer sa vie en fonction de son devoir croire
Pour ce qui est du futur, on peut planifier ses actions futures, pour amener l’action planifiée dans le présent, et donc amener de la présence dans les actions qu’on planifie.
Il ne faut pas oublier que la voie du guerrier sur le chemin de la liberté est pragmatique, ancrée dans la réalité. Amener de la présence dans les actions qu’on planifie fait partie de la traque, et l’art de traquer est un outil nécessaire du pèlerin sur le chemin de la liberté. D’ailleurs le petit tyran intérieur qu’est notre attachement au passé peut être un formidable allié comme je vous le disais un peu plus haut. Il permet de mettre en place notre propre traque, et donc d’utiliser et ramener à la fois notre “passé” et notre “futur” dans notre présent.
Par contre, quand on projette notre présent dans le futur pour tenter de satisfaire nos espoirs ou échapper à nos peurs, pour alimenter tous nos petits et grands “je veux” et “je veux pas / j’ai peur de”, on ne fait que fuir notre instant présent. On sort de la présence pour entrer dans des comportements dominés par notre suffisance / apitoiement / auto-contemplation (toujours le même trio, les Marx Brothers du “moi je”).
J’en arrive à la fin de cet article qui vous aura peut-être apporté un éclairage nouveau sur la perception du temps, et peut-être quelques clés et pistes de réflexion / action pour reprendre en main votre histoire personnelle et la définition que vous avez de vous même.
Comme cela a été exposé dans de nombreux autres articles sur le site de La Passerelle, on voit que le cheminement vers la liberté, ici dans sa dimension temporelle, est avant tout une affaire de choix, de responsabilité et d’action. On ne peut agir sur notre perception du temps sans un ancrage concret, durable, volontaire et discipliné dans l’action. Il est temps maintenant de mettre en pratique, d’exercer votre “voir” pour agir sur votre temps et faire en sorte que le temps (re)devienne un allié et non plus un tyran, et pour amener plus de fluidité et de présence dans votre présent ! To be continued…
Merwan
Liens & infos sur la perception du temps et l’histoire personnelle
A propos de l’histoire personnelle vous devriez relire VOYAGE A IXTLAN voici quelques extraits
Le LAMA BLANC : une des nombreuses bande dessinée initiatique de Jodorowsky qui mieux que d’autres sait associer spiritualité et culutre populaire. La base de ce que nous appelons la culture JEDI
La notion de Temps dans la culture chinoise antique sur CAIRN info
“L’ordre du temps” par Carlo Rovelli, un livre de vulgarisation scientifique sur le sujet – Commander chez votre libraire. Une émission de France Culture sur ce sujet
Les bases du travail de Castaneda / Don Juan Matus – extrait du livre “Le feu du dedans” de Carlos Castaneda sur SWAMI-CENTER. Même les “experts” devraient le relire de temps en temps.
L’Implantation étrangère c’est quoi ? Un parallèle très intéressant avec les Archontes de la tradition gnostique sur LIBERTERRE
La définition du JE est ancrée en parti sur une construction psycho-sociale totalement indépendante de notre volonté. JE, comme le temps, n’est qu’une construction
Une interprétation bergsonienne du bouddhisme zen par Michel Larroque aux éditions l’Harmattan
Le devoir croire, une ébauche de ce que nous avons compris des propositions de Castaneda – vous pouvez aussi lire ce document sur la philosophie du croire
L’art de traquer les 7 grands principes de ce que Don Juan Matus nomme lui même un art hautement répréhensible.