On aborde aujourd'hui un passage pas forcément facile pour le Pèlerin : l'histoire personnelle et comment effacer son histoire personnelle. Vous l'avez compris c'est le retour du podcast autour du travail de Carlos Castaneda et des enseignements de Don Juan Matus. Alors déjà, avant de lire cet article ou/et d'écouter la douce voix de Charlie, j'ai une petite question : C'est quoi pour vous "effacer son histoire personnelle" et surtout ça implique quoi CONCRÈTEMENT ?
Pour rappel, un homme de connaissance, un chaman, un guerrier de lumière ou un Pèlerin, peut importe le nom, est un être PRAGMATIQUE ! Se mettre une plume dans le cul et faire le sous-marin, pourquoi pas, mais il faut que ça ait une portée pratique. Cette utilité peut être dans le monde du Tonal, le monde des formes, des idées et de la forme de l'énergie ou dans le monde du Nagual, le monde de l'Abstrait, du Sentiment, de l'énergie.
Mais dans tous les cas c'est du "tangible" et ça a donc une portée au quotidien. Bavasser pendant des heures pour le plaisir d'étaler son savoir à défaut d'étaler de la confiture ne permet qu'une chose : perdre de l'énergie, du temps, donc de la vie. Face à la mort vous allez faire quoi ? Danser pour lui offrir le spectacle de votre vie ou lui expliquer que vous êtes hyper fort d'avoir compris un truc et que du coup elle ferait mieux d'aller boire l'apéro ailleurs (marche à l'ombre - Renaud Séchan)
Encore une fois, on va se ravir d'écouter l'ironie et la liberté du vieux péon mexicain face à l'universitaire états-uniens. Don Juan Matus qui en jouant le débile profond, va exploser la suffisance et la haute idée que Castaneda a de lui-même et de ce qu'il croit être important ou vrai.
C'est là un des points fondamentaux d'effacer son histoire personnelle : rompre notre continuité, estomper les frontières et les définitions du monde aux-quelles nous nous accrochons pour ne pas sombrer dans la folie des humains ordinaires ou dans la liberté des Pèlerins de l'immensité.
Wahou ça claque comme phrase, non ? Blague à part, pour une fois, je vais essayer de faire court et de ne pas dépasser les 2200 mots + ce petit paragraphe et les signatures exclues à savoir : 40 mots.
Cet article n'est pas LA vérité. Il n'est que le reflet de ce que j'ai compris, expérimenté et appliqué ce jour W et que j'exprime à un moment X avec un état de conscience Y.
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"Le voyage à Ixtlan" - chapitre 2
L'histoire personnelle e(s)t l'image de nous même - Podcast
L'histoire personnelle encadre notre perception du réel
On va faire très court et, comme d'habitude, au plus c'est court, au plus c'est complexe. L'histoire personnelle, de ce que j'en ai compris, vécu et mis en pratique, est composée de TOUS les faits, définitions, certitudes, doutes, habitudes, souvenirs, croyances, leçons, injonctions passés. On utilise l'histoire personnelle pour maintenir notre définition du monde, des autres et de nous-même. On agit, définit et valorise le monde à travers elle.
« LE MONDE » regroupe TOUS les domaines qui ne sont pas le JE qui est aux commandes à ce moment là. Par exemple votre tristesse et vos larmes sont « le monde » quand c'est la voie du « mec qui est pas une tafiole » qui à les commandes (ou du moins qui en a l'illusion). Un arbre c'est le monde, votre mère c'est le monde, une partie de jambe en l'air c'est le monde, etc...
Je reprends
L'histoire personnelle est composée de TOUS les faits, certitudes, doutes et habitudes qu'on utilise pour être, agir, définir et valoriser le monde et nos interactions. Pour définir le réel et la position spécifique de notre point d'assemblage nous nous appuyons sur la répétition des éléments composant notre histoire personnelle.
L'histoire personnelle est, en somme, une énorme encyclopédie de notre vie avec pour chaque élément qui la compose une « recette de cuisine » sur ce que doit être et comment bien/mal être dans une action de quel-qu’ordre que ce soit. Au moment de chaque action nous nous référons de manière non consciente à cette encyclopédie qui a été écrite pour nous et pas forcément par nous.
Vous comprenez ce qu'implique votre histoire personnelle ?
Un Arbre n'est l'arbre que parce qu'on vous a appris qu'il était / ressentait comme ceci. Vous vous croyez gentil que parce que vous avez coché les cases du gentil dans l'encyclopédie. Le caca n'est pas délicieux que parce que vous vous référez à vos expériences passés et à la baffe de votre p/mère quand vous jouiez avec.
Je ne dis pas que la merde c'est bon à manger mais que le référentiel émotionnel poussant à faire beurk n'est pas le seul référentiel possible. La merde pour un paysan est vue comme de l'or brun. D'ailleurs il y a peu dans les campagnes les dots des jeunes filles étaient souvent composées de tas de fumier. Imaginez la fortune de Kim Kardashian en tas de bouse … Idem vous êtes gentil quand vous ne contrariez pas les gens mais du coup vous ne leur permettez jamais de se voir autrement... Est-ce vraiment gentil ?
Si par malheur quelque chose nous surprend la force d'attachement à notre encyclopédie de « ma vie, mon œuvre est comme ça » va le ramener à du connu ou de l'impossible et donc à une hallucination, une folie passagère qui se soigne très vite. Summum de cet art de l'immobilisme « c'est l'autre qui est anormal ».
Dans le podcast autour de effacer son histoire personnelle c'est le moment ou don Juan Matus répond à Castaneda de manière très sérieuse « Pa » et « Ma » en gros "qu'est ce que ça peut te foutre !?". Mais en aucun cas il n'y a une volonté de Don Juan de cacher quoique ce soit, juste il remet l'église au centre du village et recentre le débat sur ce que lui veut enseigner à Castaneda et pas du tout sur ce qui arrange l'auto contemplation de l'universitaire. C'est le taf d'un nagual, ou d'un petit tyran, de briser le miroir de l'auto contemplation et Don Juan est un maître dans cet art.
Le choc à la définition du monde que s'est fait Castaneda est superbe de finesse. Le vieux péon débile auquel il croit avoir à faire se transforme en machette pour saper les définitions issues de l'histoire personnelle de Castaneda, c'est juste superbe !
L'attachement à son histoire personnelle
Grâce à l'attachement à notre histoire personnelle on vit dans un monde connu et rassurant, ennuyeux mais rassurant. Le nouveau, sur soi ou sur le monde, est en permanence ramené à du connu. La découverte n'existe pas et les seules surprises qu'on vit sont celles qu'on feint de recevoir de la part des autres histoires personnelles.
C'est l'attachement à mon histoire personnelle qui me fait me définir et me limiter à être un homme blanc handicapé issu de la bourgeoisie moyenne de province et qui s'appelle Renaud. Avec toutes les limites, droits et devoirs que ça implique.
C'est l'attachement à votre histoire personnel, à votre référentiel, votre catalogue de ce qui existe ou est possible d'exister qui vous fait me croire être un homme blanc, handicapé, issu de la bourgeoisie moyenne de province et qui s'appelle Renaud.
Mais ne suis-je que ça ? Suis-je ça ou n'est ce qu'une leçon que j'ai apprise et que je me force à me rabâcher pour ne pas l'oublier ? Ou est-ce un jeu pour passer inaperçu ? Est-ce parce que je ressemble à que je le suis ? Quid du comédien et du canada dry ?
L'histoire personnelle se retrouve dans l'inventaire du Tonal. C'est normal puisqu'elle est un élément clé dans la stabilité du Tonal et des sociétés organisées. Vous imaginez un monde où aujourd'hui je m'appelle Renaud, demain Gérard et Vendredi je serais Sylvie…
Si vous avez du mal à imaginer cette société, c'est à cause de la prégnance de votre histoire personnelle. Vous ne pouvez pas l'imaginer parce qu'aucun chapitre de cette encyclopédie n'en parle et ne vous donne le process ou la marche à suivre. Aucune voie/voix ne nous dit comment le vivre à part le vaste et flou chapitre "DANGER FOLIE ANORMALITE"
Oublier ou effacer son histoire personnelle ?
Comme le dit Charlie dans l'intro de son podcast effacer son histoire personnelle ce n'est absolument pas oublier son histoire personnelle mais juste arrêter de s'y identifier, ou plus précisément arrêter de s'y reporter, de s'y définir et donc ne plus se limiter à cette somme de points de vue sur nos expériences, sur nos interactions avec le monde intérieur et extérieur.
Notre histoire personnelle se comporte comme une sauvegarde de l'OS central (OS = Operating System) de notre JE. En fonction d'une ou deux interprétations, déductions passées issues d'un point de vue à un moment précis, ou en fonction d'un rabâchage et d'enseignements émotionnellement intenses, nous réduisons l'univers, les choses, la vie et nous-même à des vérités définitives : Je suis un handicapé, je suis fragile, je suis bipolaire DONC je peux/ou pas être / faire ceci ou cela.
Nous oublions le point central du travail que propose Castaneda, à travers les leçons de Don Juan Matus, à savoir que LA RÉALITÉ EST UN CHOIX DE LA PERCEPTION DÉFINI PAR LA POSITION DE NOTRE POINT D'ASSEMBLAGE.
Au passage n'oublions pas que ce n'est pas JE qui décide où est fixé le point d'Assemblage et que c'est encore moins JE qui va définir où il va se déplacer.
JE, dans le meilleur des cas et avec beaucoup d'efforts, va aider le point d'assemblage à se déloger de sa position ordinaire et avec encore plus d'efforts et d'énergie, va essayer d'influer là où il se stabilise avant d'aller explorer une nouvelle position. N'oublions pas non plus que la fameuse tierce attention est « l'embrasement » de TOUS LES FILAMENTS éclairant TOUTES LES POSITIONS DU POINT D'ASSEMBLAGE.
le feu ça brule, mais pas que
Pour illustrer mon propos et vous faire comprendre la différence fondamentale entre OUBLIER et EFFACER son histoire personnelle, je vous propose un exemple caricatural. A vous d'en faire quelque chose de subtil que vous pourrez répercuter dans votre quotidien:
A travers nos expériences et ce qu'on nous a appris, nous savons que le feu ça chauffe, voir ça brûle. Nous avons pu le vérifier en mettant une partie de notre corps par mégarde dans un feu ou, pour les plus parano, le vérifier par nous-même.
L'humain ordinaire, solidement attaché à son histoire personnelle, va transformer ce fait en certitude et surtout va limiter le feu à cette toute petite partie du Feu.
Chaque fois qu'il va croiser la route d'une flamme il va la cantonner à « danger ça va te brûler » ou « cool ça va cuire ta barbaque ». Il lui est quasi impossible d'envisager, agir avec le feu autrement qu'en se référant à ses deux ou trois expériences de base dont il se sert pour plier sa perception du monde, ici le feu, et le limiter à ce qu'il en a appris.
L'humain sur la voie mystique, par exemple, veut oublier son histoire personnelle et va nier l'apprentissage et les expériences faites depuis sa première lueur de conscience.
Il va s'amuser à marcher sur des braises, va considérer le feu comme une entité porteuse de joie / malheur en fonction du référentiel auquel il se raccroche. Le référentiel, la religion, le dogme, le courant, devient sa nouvelle histoire personnelle. Il sort de la représentation ordinaire pour se réfugier dans une autre.
Quand au pèlerin, il va gommer l'importance de l'histoire personnelle. Il a toujours un référentiel mais il est ouvert et fluide. Il n'est pas attaché à une limite mais utilise les limites pour pouvoir Agir.
Ce n'est plus une somme de certitudes apprises ou choisies mais une somme de faits qui peuvent changer en fonction du monde qui doit être assemblé ou de la perception qu'il en a. Le mystique ou l'humain ordinaire sont dépendants de leur référentiel pour définir et limiter leur perception du monde. Le pèlerin fait l'inverse, il adapte son référentiel à ce que le monde, sa perception exige.
Ainsi le feu est à la fois un élément de gastronomie, un outil pour y voir, une entité à part entière, un principe générateur de mouvement, une pulsion, une porte, un alliée, un adversaire valable, un ensemenceur et un destructeur, il brûle toujours mais il enseigne aussi à ne plus se brûler.
Effacer son histoire personnelle devient accepter tous les possibles. Connaître l'encyclopédie du conforme mais ne plus s'y limiter. C'est garder des cloisons pour traiter avec le monde mais accepter que ce sont des cloisons de nuages.
Des fluides qui s'interpénètrent, se mélangent et s'assemblent dans des espaces et des réalités qu'on ne trouve qu'en HP ou sur le chemin de la Liberté.
Alors qui est cet humain ? Mais d'ailleurs, qu'est ce qu'un humain ?
Podcast : Charlie – Messagère de la flamme Rôse qui boit que de la Christaline
Texte : Wilfried Broste conscience organique plus ou moins localisée
Bilan : 2134 mots ... victoire !
Des liens pour aller + loin autour de l'histoire personnelle
Je ne compte pas ça dans le nombre de mots ! Donc quelques liens pour aller un peu plus loin, l'article est forcément incomplet, vu le nombre réduit de mots ... Mais je vous encourage vivement à donner votre point de vue, votre vécu et surtout vos questions et affirmations dans les commentaires.
- Une ébauche autour de l'histoire personnelle sur notre superbe site
- Effacer son histoire personnelle, le point de vue de Xavier Seguin sur Eden Saga qui, à mon sens, confond oublier et effacer. En plus l'auteur fout une vision morale là ou il n'y en a pas car, pour mémoire, "traquer est hautement réprouvé par la morale" et le fait d'effacer, d'estomper son histoire personnelle est un pur acte de traqueur. Mais il y a plein de truc que je trouve super intéressant et puis c'est un des rares à encore parler de Castaneda sur les blogs français. Merci à lui.
- Le point de vue de Sam Keen que je ne connais pas et à dire vrai j'ai lu l'article en diagonale. A vous de voir, à vous de dire.
- Et enfin l'anti effacement de son histoire personnelle via le blog de Don Juanito qui localise autant qu'il peut Castaneda, Don Juan & co. Perso ce genre de truc m'ennuie au possible mais je sais qu'il y a des amateurs donc ...