Tandis que résonnent les trompettes de l’apocalypse, que les guerriers de la lumière s’alignent face aux forces de l’ombre, pourrait-on envisager une fenêtre une sortie à ce récurrent et dramatique je ?
Cela fait pourtant bien longtemps que le symbole du Tao est dessiné noir sur blanc et que le duel dure. En même temps, peut-on rester les bras croisés face au fascisme et aux inégalités criantes du moment ?
Non bien sûr, cela laisse à l’ennemi les mains libres. Et puis c’est tellement exaltant la lutte finale, la cause juste. Mais la voit-on, la cause, justement ?
Chez l’indifférent, chez celui qui écraserait sa mère pour ressembler à son père, chez le résigné, chez celui qui se dit : après moi, le déluge ? Chez celui qui nous explique le ruissellement, grand sourire, regard froid ; chez celui qui, avec condescendance, nous explique la vente d’armes ou la coupe des arbres ?
La liste est longue, la vue est courte, et sinon, est-ce que ça avance ? J’ai tendance à penser que la lumière noire révèle la lumière blanche, bien s’en faut, et que la Nature tend à l’équilibre. Autrement dit, que le propos ne sera pas qu’il y ait un vainqueur, et que le problème est peut-être là d’ailleurs, dans le fait de vouloir, vaincre.
Et si le héros concédait que les ennemis extérieurs sont la matérialisation de nos ennemis intérieurs ? - A chacun de voir à quel niveau, à quelle intensité, à quelle responsabilité – Que la préoccupation écologique en est une, inconsciente, d’un manque cruel d’écologie intérieure ?
Bla bla bla, et pendant c’temps-là, les bombes tombent et les SDF meurent dans le froid, les bottes claquent sur les lignes droites, comme les dents des affamés dans le vide de nos yeux.
Mince et pourtant, je ne peux pas m’empêcher, l’avidité de mon frère, ne fait-elle pas écho au vide de mon existence ? Qui consomme, qui vote, qui dormait en cours d’histoire ou sur l’trottoir la panse bien rincée ?
Qui court pour se fuir ? Qui tremble de peur au mot LIBERTÉ ? ben oui, il s’agit de l’assumer ensuite, la puberté. Qui préfère mourir les yeux rouges d’écran plutôt que s’regarder ne serait-ce qu’une seconde en face, d’un mur blanc ?
Alors s’agit-il de fuir le monde et dominer sa nature, et face à la Nature, de recevoir la Grâce ? A défaut d’être un héros qui ne fait que manquer la cible – le blanc engendre le noir qui engendre le blanc qui engendre… - pourrais-je être l’héroïque mystique qui ose guérir sa plaie plutôt qu’hurler et geindre dès que la vie érafle mon âme ?
Sauf que pendant c’temps-là, il n’y a plus d’arbres sur l’île de Pâques et qu’il y en a peut-être marre, que l’Egypte ne tombe jamais. Tout comme des sauveurs et autres victimes.
Qu’il y a peut-être un autre chemin que d’éliminer, que de lutter contre. Qu’il y aurait peut-être moyen d’avoir un temps d’avance et d’éviter la vengeance. Faut dire qu’ça fait envie, vrai ment, de lui faire bouffer les dents, à l’assassin de mon fils et de toutes les fourmis.
Où est-il le juste milieu ? Celui qui consiste à ne rien fuir et à ne rien fuir ?
P’têt dans la conjonction « et » et avec la préposition « avec » !
Être dans le monde et hors la loi, avec de quoi lutter avec moi et avec l’autre.
Comprendre que la racine s’arrache en soi et que l’on s’enracine ici-bas, que la lumière du soleil et la pluie des nuages ne relèvent pas de mon fait, mais que fleurir, si, peut-être.
Que je peux remercier celui qui éclaire qui je suis dans l’ombre, et en même temps être assez puissant pour faire trembler - de conscience – celui qui se croit assez fort pour écraser ce qu’il considère comme faible – mais qui est sa propre faiblesse.
Une fois à terre, pour le prendre dans les bras plutôt que lui donner l’coup de grâce. Ce coup que son fils te renverra, un jour de deuil. Se donner un coup d’avance, disions-nous.
Et oui, parce que notre sphère est finie, nous en déplaise, et qu’à force de jouer aux cowboys et aux indiens, c’est la vie qui risque sa peau – regarde l’eczéma de Mars, si tu en doutes. Et oublies tes machines, qui singent le vivant ! à défaut d'ouvrir les yeux, sur ta paresse.
Qu’aux lumières blanche et noire, tiens, c’est bien à la lumière de vie que nous devrions dédier notre passion sans passions – telle une croix rouge sur un beaucéant noir et blanc - et notre attachement sans obsessions – tel un guerrier voguant vers la liberté ou serait-ce sur un sentiment ?
Qu’on pourrait s’attacher à l’esprit plus qu’à la lettre, y mettre un peu de souplesse voire même d’humilité. De fermer nos gueules, comme le chante I AM, en tout cas d’écouter le chant des oiseaux et les silences parlants de nos âmes d'enfants.
Une troisième voie, qui demanderait autant d’engagement que de lâcher-prise, de tendre la main que de s’détendre ; une implacable acuité, face à soi face au monde, et aussi une implacable douceur, de celle qui rend vulnérable, plus grande force qui soit.
D’ouvrir son cœur – peut-être est-ce pour cela qu’on le crucifia sur la croix – tout en regardant droit devant soi, histoire de ne pas relancer soi-même, la roue des contraires. P'tre bien une question d'équilibre, au final.