Retour de lecture, Outrage, le malheur adolescent y’en a marre !
Voilà quelques années maintenant que j’anime et propose des podcasts de lecture. Pour vous la faire simple, chaque semaine je li l’extrait d’un texte et le diffuse en ballado diffusion, c’est le mot français pour podcast, sur mon site, deezer, itunes et podcloud. En Mars je suis tombée sur un livre, Outrage de Maryssa Rachel, qui fit scandale à sa sorti et qui à titre personnel m’a dérangé mais surtout m’a fait me rendre compte de mes vieux comportements auto destructeurs que je croyais avoir dépassé … Au final pas temps que ça.
Outrage, de Maryssa Rachel, le roman qui a fait polémique
Avant d’aller plus loin il est bon de préciser que les extraits que je lis sont tirés de textes érotiques ou du moins classés comme tels par les instances éditrices. Outrage de Maryssa Rachel n’est pas le plus “trash” que j’ai lu (il est loin derrière Sade & Bataille par exemple) ni le plus “croustillant”.
Pourtant à sa sortie, ce roman a soulevé une polémique et pas mal de réactions assez vives. Pourquoi ? Une partie de la populace simplement parce qu’il n’y avait pas de bandeau d’avertissement “réservé à un public averti”. D’autres ont carrément crié leur haine à la face de l’autrice en hurlant à l’abomination ! Ah, les douceurs et le savoir vivre des réseaux sociaux …
Au final ce livre, publié par Hugo et Cie, s’est retrouvé dans le rayon des romances… Il faut avouer qu’il n’a pas grand chose à voir avec ce rayon. En effet, on est loin du mommy porn et de la new romance.
Le livre parle de diverses “perversions”, il aborde aussi le sujet de l’inceste, de la pédophilie et, ô horreur !, il y a même une scène de zoophilie !
J’avoue que je n’ai pas été choquée par le contenu du livre ni par les pratiques décrites. Sade et ses 120 journées de Sodome m’a nettement plus choquée. Alors qu’il est décrit comme un génie… Oui ok le style, l’écriture est excellente mais à mon sens ça reste surtout les mémoires d’un sociopathe.
Outrage, le pitch rapido
Pour que vous puissiez comprendre la suite je vous fait rapidement le pitch de ce roman sulfureux !
Outrage c’est le journal intime de Rose, on suit ses méandres et sa longue descente dans les enfers de l’auto destruction. On apprend assez vite, je ne vous divul / gâche rien, que Rose avait un papa très aimant, trop aimant. Un papa qui la touchait, la baisait, un papa incestueux.
Par bribes, on recompose la vie de Rose. Au début du roman, elle partage la vie de S (une femme), avec qui elle vit une relation ouverte et très libre. Une relation avec beaucoup d’autres partenaires, une relation, comme le dit Rose, pleine de champagne, de soirées mondaines et de baises consommables. Et puis un jour, Rose rencontre Alex. Alex c’est le Loup, un artiste sale, qui se défonce, qui manipule. Un Loup qui va lui rappeler son père, et dont elle va tomber folle amoureuse. Alors Rose quitte S pour Alex …
Le roman est fait en deux parties. La première partie nous parle de la relation totalement autodestructrice de Rose et d’Alex. Leurs déchirements incessants, la quête de Rose de l’amour vrai, le grand le véritable qui transcende. Et dans la seconde partie, comme on pouvait s’y attendre, c’est l’après Alex. C’est Rose qui soigne ses plaies à grands coups de sexe qui remplit, vide la tête et fait tout oublier.
Outrage, le mal être adolescent
Alors qu’est-ce que j’en ai pensé ? Et bien je ne peux pas dire ni que j’ai aimé ni que j’ai détesté. Ni, non plus, que j’ai été choqué. Mais par contre ce livre m’a fatigué !
Tout d’abord, parlons de l’écriture. A mon sens, elle sert bien le fond. L’autrice utilise des phrases courtes, des images qui parlent, on voit, on sent, ça m’a vraiment fait penser à un journal intime, mais bien écrit le journal ! Avec des intrusions poétiques et aussi des coups de gueule contre la société qui pourrit tout. Après, à un moment donné, et là le fond et la forme se mêlent, on tourne un peu en rond.
Comme dans un journal d’ado, on revient encore et toujours sur les mêmes choses, sur les mêmes problématiques. Et au final, à la fin du livre, je n’ai pas tellement avancé. Je me suis juste enfoncée un peu plus dans le plaisir pervers de l’auto destruction.
Car même si tout du long, Rose veut s’en sortir, au final j’y lis la complaisance qu’ont la plupart des gens envers le malheur. Car oui, la plupart d’entre nous aiment souffrir. Parce que comme ça, ils se sentent vivants, il y a du feu d’artifice et ça claque !
Je suis fatiguée du malheur
Et là, je dois avouer que la complaisance absolue dans le malheur et l’autodestruction me fatiguent. J’ai fait un effort pour finir le livre. Non pas parce que j’étais choquée, mais parce que je voyais où on allait, et qu’aucune porte de sortie n’apparaissait à l’horizon. Certes, il y a des gens qui kiffent ça !
Ma belle soeur adooore regarder les films d’Almodovar parce que comme ça, et je cite, elle a la sensation que sa vie est moins merdique que celle des autres. C’est un point de vue comme un autre.
Quand je lis un livre j’aime voyager, rêver, ou comprendre l’humain et voir comment il peut évoluer. Et là, à mon sens, Rose n’évolue pas. Au contraire elle tourne en rond comme un chien dans son panier.
Alors ok Maryssa Rachel amène une vision dérangeante de l’inceste. Car son héroïne dit que oui, elle jouissait avec son Papa, elle jouissait dans les mains des adultes. E ça j’ai trouvé ça hyper intéressant.
Tout d’un coup on explose tous les codes moraux, tous les tabous. Mais alors, poussons l’enquête ! Jouissait-elle vraiment ? Sans aucune notion de bien ou de mal, de gêne ou d’intrusion ? Et bien si c’est le cas, j’ai envie d’en savoir plus, j’ai envie de savoir comment, après coup, le regard de la société, de la famille sur cette relation incestueuse amène le trauma ?
Et au final, c’est la morale, et non pas l’acte initial qui amène le trauma et la dissociation dont souffre Rose.
Si on évoluait ? Si on sortait du malheur ?
Ben oui c’est vrai ça, comment on en sort du malheur, bordel ! Là dans Outrage j’ai une jolie descente aux enfers, mais jamais la lumière du jour ne reparaît, et perso, à part le fait que l’humain adore avoir mal, je n’apprends rien. Et ça, je le savais déjà. Car je suis passée par des relations toxiques, par une recherche de fusion, par une telle détestation de moi que j’en ai fait n’importe quoi.
Pour l’autrice, ce roman s’adresse à tous ceux qui se croient uniques dans leur souffrance…
Oui, d’accord, m’enfin après avoir constaté qu’on est hyper mal et qu’on se détruit et que la vie c’est trop dark et que pour la peine, vu que l’amour c’est de la merde et que je dois choisir entre liberté ou amour et que fuck la société, ben je vais continuer à me faire encore un peu plus mal tiens !
Donc, une fois ce constat fait, on fait quoi ? Promotion de cordes chez castorama et pendons nous tous joyeusement ?
Maryssa Rachel voulait bousculer et susciter des émotions, pari réussi, car au final, en écrivant, je capte que ce livre m’a mis en colère. Parce que l’apitoiement des gens me met en colère. Parce que mon propre apitoiement me met en colère. Et que ce livre, c’est l’apologie de l’apitoiement comme justification de notre auto destruction.
Mais, malheureusement, une fois le bouquin fini, à part ce constat qu’hélas je connais trop bien, ben y a rien d’autre. Pas la moindre sortie, pas la moindre piste d’évolution. On reste enfermé cadenassé dans les comportements cuirassiques et névrotiques, et nous voilà avec une belle jambe.
Outrage, faites vous votre avis
Mais, je sais qu’il y a plein de gens qui adorent lire la déchéance, et Maryssa Rachel l’écrit et la décrit très très bien. C’est juste. Et surtout, il y a beaucoup de passages qui parlent de BDSM que je trouve très très justes. Donc oui, il y a des trucs chouettes. Mais je le relirais pas, une fois c’était long déjà.
Mais à l’intérieur de ce livre, il y a plein de choses intéressantes. Et si vous voulez plonger dans le mal être adolescent, vous y êtes, à fond ! Mais le mieux, c’est de vous faire votre propre avis, car non, hélas, je ne suis pas dieu ! Du coup, je vous ai sélectionné un petit extrait à écouter.
Pour vous offrir Outrage, de Maryssa Rachel, c’est dans votre librairie ou sur le site des éditions Hugo et Cie.
Je n’ai pas lu ce livre, je ne le lirai pas, et CHOSE EXCEPTIONNELLE, je n’en ai pas écouté ta lecture et ne l’écouterai pas, tu en connais les raisons.
La réflexion qui me vient immédiatement à l’esprit en lisant ton article c’est que la destruction n’a de sens que si l’on se BAT pour la recontruction. Baisser les bras, trouver les bonnes excuses pour se noyer dans son malheur, c’est beau, c’est artistique, c’est… nul à chier en fait, parce que c’est facile, tellement facile !
Affronter ses démons, regarder la réalité en face, ouille, ça fait souvent mal, on a tous été victime, on a tous été bourreau, après ce constat, on fait quoi ?
J’ai choisi de me battre pour accepter les bonheurs qui parsèment ma route, sans oublier les cailloux dans les chaussures de mon passé.
Merci encore pour ce bel article.
Nous sommes bien d’accord – t’as vu je parle de Je en disant Nous, jupiter sort de ce corps ! – Trêve de déconnage, tiens je note aussi qu’en ce moment j’utilise presque excessivement le mot “trêve” une volonté pacifiste vraisemblablement, donc trêve de tout ça n’oublions pas qu’en plus les cailloux qui nous ralentisse peuvent parfois, et même souvent, nous permettre de voir la petite abeille butiner la marguerite ou d’humer la bonne odeur du temps des cerises… Ouais je sais je vire hippies si j’avais des cheveux (même court) ben clairement j’irais pas me les faire couper (cette fin de commentaire n’a pas vraiment de sens j’en suis parfaitement lucide)